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Alexandre Hollan : par-delà le motif de l'arbre

Publié le par MG

Quand on trouve un arbre qui s'impose par la masse de son feuillage, il faut trouver le côté par où il s'ouvre, et d'où il a l'air de tourner. Pour éprouver sa masse, attendre qu'il soit en contre-jour. Le regard doit l'apprivoiser par le mouvement, en suivant son rythme. (Celui des chênes est fort, imprévisible, avec des changements abrupts). Les masses apparaissent plus tard dans leur force unificatrice. Elles flottent, grandissent, créent des plans. Quand la forme arrive à sa plénitude, l'espace s'assombrit, les blancs se concentrent, pour faire tourner l'arbre dans le paysage."

Alexandre Hollan, "Rythme, masse, lumière" in Autopoïétique, carnet 2, Presses Universitaires de Valenciennes, ae2cg Editions, Paris, 2000 (p. 34).

 

Alexandre Hollan- Gignac

Alexandre Hollan à Gignac en 2005 - Photo : Illés Sarkantyu.

 

Alexandre-Hollan-fusain-sur-papier-50x65cm-galerie-vieille-

- Pourquoi le motif ? Pourquoi l'arbre ?

- Mon problème, c'est de percevoir c'est-à-dire d'éprouver un contact avec ce que je regarde. Le motif n'est que le révélateur de la vision. Il ne cherche pas à raconter une histoire. L'arbre s'oppose à la lumière. Je dessine à contre-jour. Il est comme l'ombre qui montre autant qu'elle cache. Le tronc absorbe la lumière : je ne le peins jamais. La lumière est dans la matière. L'arbre absorbe. Je me sens proche de la densité qu'Eugène Leroy invoque mais j'ai une sorte de réflexion sur la vision, une réflexion intellectuelle que lui n'avait pas. Mon travail est donc moins fidèle à un style unique.

 

Alexandre Hollan -calligraphies d'arbre

- Faut-il voir une différence entre les motifs calligraphiques dans lesquels le geste est plat, sans profondeur, abstrait et le reste de votre travail ?

- Pour avoir une perception, il faut changer de temps. Je m'arrête. J'arrête mon regard et je laisse apparaître ce qui est dans la tranquilité. Je choisis la lenteur pour sortir de la mécanicité du regard. J'évacue toute pensée. Quand l'image n'existe plus, l'énergie apparaît. Il ne s'agit donc pas de calligraphie mais de signes d'arbre, d'écriture d'arbre. Les deux extrêmes sont le mouvement - c'est ce que vous appelez les calligraphies - et l'espace - les dessins au fusain où il n'y a pas de mouvement, pas de trait ; le regard y est comme suspendu, flou.

 

Alexandre Hollan - Nature morte

- Couleurs et formes se fondent, comme chez Eugène Leroy...

- Ma vision va dans plus de direction que celle de Leroy. Ma peinture est plus réfléchie, comme celle de Giorgio Morandi.

 

- Comment obtenez-vous ce flouté, ce flottement de l'image ?

- J'utilise l'aquarelle. Je reviens avec les couches, parfois jusqu'à vingt couches. C'est un travail très long et c'est la durée qui modifie la peinture. Pour les natures mortes, je travaille dans l'atelier ; pour le reste, je suis toujours devant le motif.

 

Alexandre Hollan-trois arbres

- Votre peinture semble reposante.

- Le côté reposant, c'est ma nature. Entre le conscient et l'inconscient, il y a l'image. Pour que le subconscient émerge, il faut le favoriser. Il faut donc se calmer, tranquiliser notre aspect combatif, efficace... alors quelque chose apparaît.

 

 

MG - Propos d'Alexandre Hollan recueillis dans la galerie Kita, le 23 novembre 2000.

 

Illustrations de haut en bas :

- Alexandre Hollan, Grand chêne, fusain sur papier, 50 x 65 cm, ca 1987 ;

- Alexandre Hollan, Sept séries de perception d'arbres, gouaches sur papier, 2000-2002 in L'arbre au-delà des images, William Blake & Co Editions, Bordeaux, 2003 (p. 29) ;

- Alexandre Hollan, Vie silencieuse, aquarelle sur papier, 82 x 106 cm, 2009 ;

- Alexandre Hollan, Trois arbres.

 

 Lire aussi :

- Projet d'exposition Alexandre Hollan / Eugène Leroy.

 

 

L'Autre Regard (The Other View) from Jacques Burtin on Vimeo.

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